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mardi 13 août 2024

Situation de l'ancienne chapelle de Ste Gemme et de l'église de Lanluet.

Pour répondre aux demandes qui m'ont été faites suite à la conférence du mois de mai, je publie ici les documents qui m'ont permis de situer précisément l'endroit où se dressaient la chapelle de Ste Gemme et l'église de Lanluet avant que ces deux édifices ne disparaissent suite à leur vente comme biens nationaux de première origine.


L’abbé Longuet, dans ses notes sur le culte de Sainte Gemme, rapporte que c’est Blanche de Castille qui consacra ici une chapelle à Sainte Gemme à qui elle vouait une profonde dévotion.

 

La chapelle de Ste Gemme.

 

                                                

Arch. Nat. carton LXV n° 47

Cette chapelle se trouvait sur le chemin qui part de la rue de la Chapelle en face de la rue Tricherie et descend en pente rapide à travers bois jusqu’à Feucherolles. Ce chemin traverse aujourd’hui le domaine du Breuil.

 

                                                        

© Any Allard

La chapelle se situait sur le petit chemin à droite après avoir franchi les croisées, là où fleurissent au printemps des lilas.


                                            

© Any Allard

 

                                                                                  

A.D.78, Carte des chasses de Louis XV
 
                                                                                        
A.D.78, Plan d'intendance, 1787, série C

Au moment de la Révolution cette chapelle fut l’objet d’un violent conflit entre Poissy et Ste Gemme car elle contenait de très riches ornements offerts par les rois, que chaque communauté revendiquait. En effet, la chapelle de Sainte Gemme dépendait de l’église collégiale de Poissy, alors que les curés de Lanluet se considéraient comme curés de Ste-Gemme car ils y faisaient aussi l’office et en revendiquaient la dîme.

 

Les pouvoirs de Sainte Gemme

 

La question se pose donc de savoir pourquoi Blanche de Castille vouait un culte particulier à Sainte Gemme.

Il est fort possible que cette dévotion puise son origine dans le lieu de naissance de Blanche de Castille, la ville de Palencia au nord-ouest de l’Espagne car c’est dans cette même ville que certains auteurs font naître Gemma ce qui fait que Blanche aurait particulièrement bien connu l’histoire de cette Sainte.

On peut encore mieux comprendre la joie qu’a peut-être ressenti la jeune reine à retrouver si loin de la cour de Castille, un nom qui lui est familier, quand on sait que Blanche a été mariée au futur Louis VIII à 12 ans, et qu’elle devait alors se sentir bien seule en France.

 

Outre le pouvoir d’aider les femmes stériles à avoir un enfant, on attribue à Sainte Gemme la guérison des enfants ayant un retard de la marche, et par extension des personnes ayant des problèmes aux membres inférieurs.

 

Nous pouvons illustrer ces deux croyances avec les cas de Blanche de Castille pour la première et de Jean Caboud pour la seconde.

 

Blanche de Castille était loin d’être stérile : elle eut 12 enfants mais parmi les 4 premiers, trois filles meurent en bas-âge et elle n’a plus alors qu’un seul garçon vivant, Philippe, qu’elle sait peut-être de santé fragile puisqu’il mourra en 1218 à l’âge de 9 ans.

 

Une Reine de France se doit d’assurer au maximum la descendance en un temps de forte mortalité infantile comme au Moyen Age, d’autant plus que la loi salique ne permet pas aux filles de régner en France. Il fallait absolument un second fils.

 

Peut-être est-ce cela qui a poussé Blanche de Castille à venir boire l’eau de la fontaine en contre-bas de la chapelle de Ste Gemme puis à en tirer la cloche avant de déposer des offrandes comme le rapporte la légende.

 

                                                                                           

© Any Allard

 Quant à Jean Caboud, un écuyer seigneur de Villiers, entre Poissy et Villennes,  il acquiert, au début du XVIIIème siècle, les terres de la ferme de Sainte Gemme où reste encore alors quelques ruines du château, dont il devient donc propriétaire mais cette acquisition est surtout motivée par le fait qu’il y a dans les prés de la propriété, la fontaine de Sainte Gemme car il attribue à la Sainte la guérison de sa jambe.

 

Cette fontaine, appelée au moment de la Révolution Fontaine du Roseau (puisqu’on ne peut plus évoquer les Saints à ce moment-là), est un des rares points d’eau de la commune. Elle est alimentée par une source dont on retrouve l’eau dans le lavoir de Lanluet puis près de l’entrée du golf où il rejoint le ru des pierres et s’infiltre ensuite sous terre.

 

Ru des pierres face à l'entrée du golf. © Any Allard


                                              
                           


                                                                  

    Lavoir du Lanluet au trou n° 10 du golf.
                                                

La source qui alimente la fontaine de Ste Gemme est située sur la même courbe de niveau que la source qui alimente le lavoir de Feucherolles, soit la courbe de 140 m d’altitude.

 

L’abbé Gautier, en 1892, parle d’une « fontaine aux eaux pures et abondantes » et signale que « au-dessus de cette fontaine est une construction assez informe en maçonnerie dans laquelle est une petite grotte et une construction de l’Ecce Homo. » (Voici l’Homme)

 

Il rappelle aussi que c’est un ancien pèlerinage autrefois très fréquenté.

Il situe cette fontaine « au pied du chemin qui monte vers la colline », (c’est le chemin que nous venons de descendre), ce chemin menant au cimetière et à l’église de Lanluet un peu sur la gauche. »

 

A.D.78, Carte des chasses de Louis XV

L’église St Martin de Lanluet et le cimetière se situaient là où il y a aujourd’hui le practice du golf. 

 

                                    

A.D.78 Plan terrier seigneurie de Feucherolles.
 

Nous n’avons pas de représentation de cette église mais la description faite au moment de la vente des Biens du clergé nous donne une idée de son importance : 200 m2 en pierre et moellons éclairés par neuf croisées et pavés de carreaux de terre cuite et de dalles de pierre.

 

Elle était en très mauvais état depuis que la foudre s’était abattue sur le clocher en juin 1723, faisant beaucoup de dommages à l’intérieur de l’église, et ses abords étaient très marécageux, ce que l’on peut encore constater en observant les jours de pluie les abords boisés voisins.

 

Cette église est vendue comme bien national du clergé à la fin de la Révolution et démolie. Les boiseries et les pierres sont vendues, la chaire se trouve dans l’église de Saint Nom la Bretèche.

Les terres sont alors rendues à l’agriculture jusqu’à la construction du golf.

 

Et l’église et le cimetières oubliés jusqu’à ce que les travaux d’excavation révèlent des ossements, ce qui me valut d’être appelée par la police qui demandait des explications : en effets les pelleteuses creusaient alors plus profondément que les vétustes engins agricoles employés jusque-là ! Ces ossements ont été respectueusement déposés à l’Ossuaire du cimetière de Feucherolles.

 


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