Nous avons
vu dans nos précédents articles comment, après l’ensablement du port des
évêques, l’avant-port avait été conçu et réalisé. Il est temps, pour terminer
cette Histoire, de s’intéresser au creusement des deux bassins.
Le premier bassin : 1866-1880 :
Bayeux avait raison en 1845 de refuser de
payer pour le projet de Bouniceau : le port construit n’est pas
satisfaisant. Trop exposé aux vents du large il n’offre ni un refuge sûr aux
navires, ni une protection efficace du rivage contre les tempêtes. Et les
installations ont coûté 2 millions et demi de francs.
Le 14 mai 1866 le conseil municipal affirme
que le port est une source d’avarie pour les bateaux de pêche et que les
capitaines de navires refusent d’y venir l’hiver et par gros temps. Il réclame
donc un port intérieur d’échouage comme l’avait fait construire l’évêque de
Bayeux au XVème siècle. Les pêcheurs s’engagent même à offrir 20 000
francs en effectuant une retenue sur la vente du poisson.
L’Etat, peu enclin à de nouvelles dépenses,
charge cependant une commission d’étudier les moyens d’améliorer le port. Il
faut attendre 10 ans pour que le ministre des Travaux Publics adopte, le 17
mars 1876, le projet d’un bassin intérieur d’échouage.
Suivant les plans, une passe de 75 mètres de
long relie l’avant-port à un bassin de 150 mètres de long sur 50 de large dont
l’extrémité sud est formée par le vieux pont des évêques. Ce premier bassin
s’arrête à la hauteur de la rue de Bayeux.
Eugène Marion Port-en-Bessin la passe.
En 1880, le creusement de la passe et du
bassin est terminé. Le pont tournant est mis en place en juillet.
Même si la houle se fait encore sentir dans
le bassin, la sécurité y est satisfaisante. Mais les ingénieurs ont vu trop
petit ! Le port ne peut accueillir la flottille de pêche qui ne cesse de
s’accroître et les bateaux de commerce de plus en plus nombreux. Il y a danger
comme le prouve la carte postale suivante :
La Chambre des Députés classe
l’agrandissement du bassin de Port parmi les affaires urgentes et les travaux commencent
fin 1882. Il s’agit de construire un second bassin d’échouage de même dimension
que le premier avec lequel il communique par un chenal. Au fond du bassin, au
sud, il est prévu une cale de radoub associée à une cale pour le lancement des
navires et le halage à terre des embarcations
C’est l’excavateur qui a servi au creusement du canal de Suez qui est loué 90 francs par jour pour déblayer les terres au rythme de
Beau succès pour ce second bassin ; le nombre des barques se multiplie, la prospérité et la population augmentent. Sur cette lancée, les projets repartent de plus belle : projet grandiose comme celui de Reingard présenté en 1895 au Ministère de la Marine qui prévoit de relier les deux bassins de Port à un autre port à la Goulette de Vary par l’intermédiaire d’un nouveau bassin, cette fois à flot et d’un nouveau chenal ; projet plus réaliste à partir de 1929 de Philippe Oblet alors Président de la Chambre syndicale des Armateurs qui prévoit l’agrandissement du second bassin.
Rivalités d’hommes, rivalités
d’intérêts et surtout guerres mondiales sont autant d’obstacles à ces projet
Aménagements dans
l’avant-port 1956-1957 :
Au moment où la France se
reconstruit, une étude est menée pour trouver une solution à l’insécurité du
premier bassin par mauvais temps. Pour ne pas retomber dans les erreurs
passées, il est décidé de faire des essais sur un modèle réduit du port,
travail confié au Laboratoire National d’Hydraulique de Chatou.
Le projet retenu comprend
un aménagement de l’avant-port par la construction d’une jetée prolongeant
l’épi dit de la Poissonnerie et d’une autre, en face, partant du môle de l’est,
formant entre elles une passe de 55 mètres.
Des jetées sont aussi
construites au sud du môle de l’est pour amortir la houle. Les travaux sont
efficaces : le premier bassin est beaucoup plus calme à la surprise des
pêcheurs qui n’y croyaient pas vraiment. Mais en 1959 la Commission des Pêches
maritimes du Calvados conclue à l’impérieuse nécessité d’un troisième bassin
permettant d’améliorer les manœuvres des bateaux et la manutention et la vente
du poisson. L’année suivante, armateurs et patrons de pêche obtiennent la mise
en place d’une porte d’écluse à l’entrée du premier bassin.
L’agrandissement du
second bassin :
A la fin des années 60, la
CODER (Commission de Développement Economique Régional) de Basse Normandie
admet l’urgence de « l’agrandissement des ouvrages portuaires pour
l’accueil d’une cinquantaine de bateaux d’un tonnage plus important. »
Les travaux de construction d’un troisième bassin débutent en 1970. C’est encore une fois sans compter sur la force de la nature : les eaux souterraines émanant des Fosses du Soucy coulent sous les terrains à déblayer. Plus l’excavation progresse, plus le chantier est envahi par les eaux. Il est impossible de construire un troisième bassin sans ouvrir largement le second bassin pour continuer les travaux à marée basse. Il n’y aura donc pas de troisième bassin mais un prolongement du second bassin pour former un plan d’eau plus vaste.
Les travaux de construction d’un troisième bassin débutent en 1970. C’est encore une fois sans compter sur la force de la nature : les eaux souterraines émanant des Fosses du Soucy coulent sous les terrains à déblayer. Plus l’excavation progresse, plus le chantier est envahi par les eaux. Il est impossible de construire un troisième bassin sans ouvrir largement le second bassin pour continuer les travaux à marée basse. Il n’y aura donc pas de troisième bassin mais un prolongement du second bassin pour former un plan d’eau plus vaste.
Mais demain ? La
pêche, le tourisme : et si l’histoire de Port, du port, était encore à
réinventer ?
Any
Allard
Sources :
Archives départementales du Calvados :
Carte des villages de Port et de Commes en 1761,
dessin lavé de Nicolas Antoine.Archives départementales du Calvados :
Plan de
Port, dessin lavé par Pierre Broquet 1776, AD du Calvados.
« Mémoires pour servir à l’Histoire de
la ville et diocèse de Bayeux » Société des Sciences, Arts et
Belles-Lettres de Bayeux, 2010.
Base
photographique des Archives, base Mérimée.
Le Pilote : articles de Charles Garnier 1910-1911
François Renaud : Charles Mozin, des bateaux et des marins, conférence à Trouville aout 2004
Louis AUBOURG : Notice sur Port en Bessin, Bibliothèque de Lisieux.
Pierre Gouhier : Port en Bessin 1597-1792, cahier des Annales de Normandie, 1962
Philippe Oblet : L’Histoire de Port en Bessin, 1978.
Le Pilote : articles de Charles Garnier 1910-1911
François Renaud : Charles Mozin, des bateaux et des marins, conférence à Trouville aout 2004
Louis AUBOURG : Notice sur Port en Bessin, Bibliothèque de Lisieux.
Pierre Gouhier : Port en Bessin 1597-1792, cahier des Annales de Normandie, 1962
Philippe Oblet : L’Histoire de Port en Bessin, 1978.
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