Si les églises sont toujours des « livres de pierre » pour enseigner la religion, elles permettent aussi de retrouver l’Histoire des villages dont elles ont longtemps été le cœur, comme le montre l’histoire de la plaque de marbre noir dans l’église de Feucherolles.
Texte inscrit sur la plaque :
« Dame Catherine Laubier femme du sieur Martin Peron officier du Roi demeurant à Valmartin paroisse de St Nom la Bretesche laquelle a donné et légué à perpétuité et à titre de rente annuelle perpétuelle à l’église de céans la somme de 20 lt (livre tournoi) de rente à condition par les marguilliers de la dite église de faire dire tous les ans dans la dite église 15 messes basses tant pour le repos de l’âme de Messire Jean Laubier vivant officier du Roi son père que pour au-dit dénommé de la dite rente plus 15 lt aussi de rente annuelle pour les pauvres de cette paroisse qui leur seront distribuées par chacun an le 8 mai par la dite dame donatrice de son vivant et après sa mort les dites 15 lt de rente seront distribuées aux sis-dits pauvres par les sieurs curés de la dite église à condition que les dits pauvres seront obligés d’assister à la messe le dit jour 8 may le tout à perpétuité et ainsi qu’il est plus au long et porté par le contract fait et passé devant Julien Chupin tabellion juré au dit St Nom le 23 mars 1724.
Priez Dieu pour leurs âmes. »
C’est à la demande de Catherine LAUBIER que cette plaque est installée en 1724 dans l’église de Lanluets vis-à-vis de la sépulture de son père Jean LAUBIER mort le 7 mai 1723 à St Nom la Bretèche à l’âge de 83 ans. Selon les actes la famille est nommée « LAUBIER » ou « de LAUBIER », ce qui explique les armoiries de la fondatrice en haut de la plaque : un écu supporté par deux aigles et surmonté d’un casque à cinq grilles de face, avec lambrequins.
Lorsque l’église de Lanluets est détruite au moment de la réunion de la paroisse de Lanluets Ste Gemme avec celle de Feucherolles en 1806, la plaque commémorative ou épitaphe est placée sur le mur de la chapelle de droite, près de l’abside, dans l’église de Feucherolles.
Jean LAUBIER était officier du Roi avec la charge de musicien comme son père, plus particulièrement Fifre de la Grande Ecurie du Roi. Cette charge de Fifre du Roi a été créée par François Ier. Le fifre est une petite flûte au son aigu souvent présente dans les fanfares militaires.
Deux mois avant sa mort Jean Laubier avait accompagné, avec les autres musiciens de la Cour, Louis XV au Parlement de Paris où le 22 février le Roi avait tenu un lit de justice pour que les Parlementaires prennent acte de sa majorité, à savoir 13 ans.
Nicolas Lancret, le lit de justice à la majorité de Louis XV, 1723, Musée du Louvre. |
Jean LAUBIER meurt chez sa fille Catherine LAUBIER qui réside au château de Valmartin (sic) avec son troisième époux Martin PERON, officier de la chambre du Roi. La ferme de Valmartin est appelée souvent« manoir » aux XVIème et XVIIème siècles, mais elle appartient aux Dames de Poissy depuis le début du XVIIème. En l’état actuel de recherches rien ne permet d’affirmer que cet ancien siège d’une seigneurie, devenu élevage de moutons à la fin du XVIIIème soit la résidence des PERON et LAUBIER, à moins qu’ils en aient reçu une partie en fief.
Catherine LAUBIER avait épousé en premières noces Louis LETELLIER, le 26 septembre 1689, à Lanluets dont elle était originaire.
Son époux étant décédé, elle épouse un an plus tard à Versailles Jean Noel MARCHAND, organiste de la chapelle royale de Versailles dont elle a 8 enfants. Dans le même temps sa sœur épouse le frère de Jean Noel, Jean Baptiste violoniste du Roi. Les jeunes filles Laubier ont été élevées en musique, c’est sûr !
Huit ans après la mort de son deuxième époux, Catherine se marie à Versailles, le 5 avril 1718, avec Martin PERON, officier du Roi, veuf lui aussi et originaire de St Nom la Bretèche. Coup de foudre ? D’après l’acte des registres de la paroisse Notre-Dame de Versailles, ils se sont fiancés la veille du mariage !
Les familles vivaient alors en osmose, sans beaucoup de possibilités de contact loin du cercle familial : Jean PERON fils du premier mariage de Martin avec Catherine LEVEILLE, épouse à St Nom en 1722, soit quatre ans après le mariage de son père avec Catherine LAUBIER, une des filles de sa belle-mère, Louise Thérèse Victoire MARCHAND.
La famille LAUBIER est aussi apparentée aux GUIGNARD, famille noble très influente à Feucherolles et à Davron dès le XVIème siècle, par le fait que la sœur de Catherine, Marie Anne LAUBIER, a épousé Pierre Paul GUIGNARD de Butteville : Marie Anne et Pierre Paul sont les grands-parents de Claude André Toussaint GUIGNARD, maire de Feucherolles de 1791 à 1812, et parrain d’une des cloches de l’église nommée Philippine.
Tombeau Guignard Hauducoeur à Feucherolles |
Sources :
Généalogie des Guignard par Ludovic Guignard de Butteville, 1892. Merci à Christian Haquin pour son aide concernant cette généalogie.
Cocojobo.over-blog.com : « cocojobo » est un descendant des Laubier.
Gene78 : généalogie des Peron
Actes de mariage de la paroisse Notre-Dame de Versailles, Archives départementales des Yvelines.
Any Allard
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